Histoire de la Terre et de la vie - Actualités géologiques

Energies et climat

Une vérification expérimentale de l’effet de serre radiatif

L’objet de cet article est de présenter une vérification expérimentale de l’effet de serre radiatif faite en 2022 par les physiciens allemands Hermann Harde et Michael Schnell. Ils voulaient démontrer son existence car certains climatosceptiques affirment qu’il n’existe tout simplement pas. Cela leur permet de dire que l’ajout de gaz à effet de serre (GES) dans l’atmosphère ne peut pas modifier les climats de la Terre. Harde et Schnell sont eux aussi climatosceptiques, mais ils sont plus respectueux de la science. Harde, qui a fait carrière à l’université de Hambourg, est spécialisé en optique, photonique et spectroscopie. La conclusion de cette étude est que l’ajout de GES a peu d’effet et donc que l’alarmiste climatique n’a pas lieu d’être.

Harde attaque le problème sous un autre angle en affirmant que l’augmentation de la teneur en CO2 atmosphérique, qui a commencé vers 1850 avec l’utilisation des combustibles fossiles, est principalement naturelle. La part humaine dans le CO2 émis ne dépasserait pas 15 %.

J’ai déjà parlé de l’effet de serre radiatif dans cet article, de manière très détaillée quoique sans formule mathématique, ainsi que dans l’article consacré à l’empreinte de l’activité humaine sur la troposphère et la stratosphère. Mon objectif était d’expliquer l’effet d’une augmentation de la teneur en CO2 atmosphérique.

L’expérience de Harde et Schnell

Le dispositif expérimental comprend un réservoir aux extrémités desquelles deux plaques sont disposées. L’une d’elles, de couleur noire et chauffée à 30 °C (TPE dans le schéma), représente la Terre. L’autre est refroidie à – 11,4 °C (TPC), représente l’atmosphère. Une distance de 111 centimètres les sépare. Le gradient de température ainsi créé est de 0,373 °C/cm du bas vers le haut. Quatre thermomètres sont placés entre elles, mesurant des températures notées T1 à T4, le premier se trouvant du côté de la plaque Terre et le quatrième du côté de la plaque atmosphère. La plaque Terre est placée en haut afin que sa présence ne provoque pas de convection dans le mélange gazeux : l’air chaud a tendance à monter. On ne peut pas éviter de transport de chaleur par conduction, mais on le minimise en mettant la plaque Terre sous un dôme dont la température est maintenue autant que possible à 30 °C. Ce dôme fait office d’isolant thermique. De la sorte, on s’assure que les transferts d’énergie se fassent de manière presque uniquement radiative.

Dispositif expérimental

Le réservoir étant rempli d’un air dépourvu de vapeur d’eau (qui givrerait la plaque atmosphère), on ajoute un gaz à effet de serre. Harde et Schnell ont fait cette expérience avec du dioxyde de carbone, du méthane, du protoxyde d’azote et de l’ozone. On observe que durant la période d’addition et d’homogénéisation du GES, la température de la plaque Terre augmente, et que les autres températures restent constantes. On réduit alors son chauffage électrique HE afin de faire revenir sa température à 30 °C.

Intensité spectrale du rayonnement thermique (proportionnelle à la luminance spectrale) émis par la plaque Terre à 30 °C et reçu par la plaque atmosphère. On n’utilise pas ici la longueur d’onde sur l’axe des abscisses, mais le nombre d’onde. Quand on ajoute 20 % de CO2 dans l’air sec du réservoir, son rayonnement thermique est totalement absorbé autour de 670 cm–1. Dans ce graphique, la réémission des infrarouges par le CO2 n’est pas prise en compte. De la radiance initiale de 479 W/m² (intégrale de la courbe bleue), il ne reste que 402,4 W/m². La transmission est donc de 83,8 %.
Le CO2 réémet les infrarouges qu’il a absorbés, en partie vers la plaque atmosphère. On observe par conséquent des infrarouges autour de 670 cm–1, mais ils ont été émis en bas du réservoir, à une température plus basse qu’en haut. Le calcul a été effectué pour une distance de 111 cm et un gradient de température de 0,373 °C/cm. Au total, ce sont 48,5 W/m² qui sont réémis vers la plaque atmosphère, si bien qu’elle reçoit 450,9 W/m². L’encoche qui est faite dans la courbe bleue est une bande d’absorption.
De tous les infrarouges qui ont été réémis, 24,2 W/m² ont été renvoyés vers la plaque Terre. Ils constituent le rétro-rayonnement. Ils s’ajoutent aux infrarouges qui sont émis par la plaque atmosphère vers la plaque Terre, dont la radiance est de 266 W/m². L’augmentation est par conséquent de 109,1 %. On voit bien la bande d’émission autour de 670 cm–1. Cette augmentation compense presque exactement la perte que les infrarouges émis de la plaque Terre vers la plaque atmosphère subissent. Le gradient de température en est la cause. Sans ce gradient, le pouvoir d’absorption et de réémission du CO2 ne serait pas visible.

Puisqu’il n’y a ni conduction ni convection, l’augmentation de la température de la plaque Terre n’admet pas d’autre explication que l’apparition d’un rétro-rayonnement dû au GES. On peut parfaitement, grâce à la physique de l’atmosphère, prédire cette augmentation. Les observations sont conformes à la théorie. La distance entre les deux plaques est largement inférieure à l’épaisseur de la troposphère (la partie inférieure de l’atmosphère), qui est d’une dizaine de kilomètres. On compense cette faible épaisseur par une concentration élevée du GES. Ce n’est pas 0,042 % (420 ppm) de CO2 que l’ajoute, comme dans l’atmosphère actuelle, mais jusqu’à 20 %. Cela réduit le libre parcours moyen des photons infrarouges, qui devient très inférieur à la longueur du réservoir. Sans cela, le rayonnement thermique de la plaque Terre ne pourrait être absorbé ni réémis.

Conséquences d’un ajout de 10 % de CO2 dans le réservoir. La température de la plaque Terre TPE augmente sous l’effet du rétro-rayonnement. On la remet à 30 °C en réduisant son chauffage. La température du dôme TDom est de 30 °C et celle du laboratoire est de 20 °C. On doit s’attendre à une baisse de la température à la base du réservoir, qui correspond au refroidissement de la stratosphère.

De plus, la température de la plaque Terre augmente d’une manière logarithmique avec la hausse de la concentration en CO2, conformément à ce qui est calculé pour l’atmosphère terrestre. Pour celle-ci, une bonne approximation est donnée par la formule que le climatologue Gunnar Myhre a calculée en 1998. Si l’on appelle C0 la concentration du CO2 avant l’ère industrielle et C la concentration actuelle, alors le forçage radiatif vaut 5,85 × ln(C/C0). C’est le flux d’énergie supplémentaire, en W/m², que la surface de la Terre reçoit. Pour estimer l’augmentation de température qui en résulte, il faut connaître la sensibilité climatique à l’équilibre. C’est la réponse du système climatique à un doublement de la teneur en CO2 atmosphérique.

Conséquences de l’augmentation de la concentration du CO2 dans le réservoir. Les données mesurées sont comparées aux résultats des calculs. Toutes ces courbes sont logarithmiques.

Hermann Harde estime que celle-ci est égale à 0,7 °C, loin des 3 °C retenus par le dernier rapport d’évaluation du GIEC. Cela peut se discuter. Son expérience, qui ne tient pas compte de la vapeur d’eau ni de l’interdépendance des différents gaz, demande à être améliorée.

Je lui laisse le mot de la fin :

Ces mesures démontrent clairement que contrairement à la deuxième loi de la thermodynamique, souvent mal interprétée, un corps plus chaud peut être chauffé davantage en absorbant le rayonnement d’un corps plus froid, ici le rayonnement de la plaque refroidie et un GES. Ils confirment également que les GES émettent toujours des rayonnements infrarouges vers l’arrière dans des conditions telles que celles rencontrées dans la basse atmosphère. Les mesures sont bien confirmées par des calculs approfondis […], qui sont en plein accord avec les données de température et de chauffage électrique enregistrées, ceci en nombres absolus et sur toute l’évolution en fonction des concentrations de gaz. Tout effet notable sur le bilan énergétique dû à la conduction thermique peut être exclu par des expériences de contrôle avec des gaz rares. […]

À long terme, une transition économique vers de nouvelles formes de production d’énergie, quelle qu’elle soit, est inévitable, puisque l’approvisionnement en combustibles fossiles est limité. Il n’est toutefois pas nécessaire de mener ce processus aveuglément et à la hâte ; sinon, il y a un risque de désindustrialisation, ce qui entraînerait alors un avenir vraiment désastreux pour les générations futures.

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