Le basalte est la plus répandue de toutes les roches volcaniques. Elle est constituée d’une « pâte » noire dans laquelle des phénocristaux (cristaux visibles à l’œil nu) sont parfois présents. Ceux-ci sont des feldspaths plagioclases blancs et des pyroxènes noirs à vert sombre, ainsi que des olivines vert-jaune. Cette pâte, ou mésostase, comprend des cristaux microscopiques et du verre. On y retrouve les mêmes minéraux que ceux déjà cités, ainsi que des oxydes de fer et de titane. Dans un verre, les atomes ne sont pas ordonnés comme dans un cristal. Il s’agit en fait d’un liquide qui a été brusquement refroidi et figé.
Des roches à olivine, pyroxènes et plagioclases
Les olivines sont plus connues sous le nom de péridots. Ce sont des mélanges de deux minéraux, la forstérite Mg2SiO4 et la fayalite Fe2SiO4, qui sont respectivement des silicates de magnésium et de fer. Certains minéraux sont capables de se mélanger lors de leur cristallisation : ils constituent des « solutions solides ». Les olivines, qui en sont le meilleur exemple, ont donc pour formule (Mg,Fe)2SiO4, où les proportions de magnésium et de fer sont quelconques. Mais c’est presque toujours le magnésium qui prédomine. Les plagioclases sont également des solutions solides. Ce sont des alumino-silicates de calcium et de sodium appartenant à la grande famille des feldspaths. Quant aux pyroxènes, ils sont des silicates de magnésium, de fer, de calcium, de sodium… comprenant des groupements SiO3.
La composition des basaltes est variable. Une première manière de les décrire consiste à donner leur composition en oxydes de silicium SiO2, de magnésium MgO, de fer FeO et Fe2O3, de calcium CaO, d’aluminium Al2O3 et ainsi de suite. Ce serait la composition de la roche si elle était totalement fondue. Les magmas basaltiques comprennent entre 45 et 52 % de silice SiO₂. De telles roches sont dites basiques. Cette quantité de silice est faible, c’est pourquoi il y a rarement des cristaux de quartz dans un basalte, le quartz étant de la silice cristallisée. Il y en a en revanche dans les granites, qui sont des roches acides avec plus de 63 % de silice.
Classification des basaltes
Les granites ont l’avantage d’être totalement cristallisés. Ils ne comprennent aucun verre. Or les géologues ont l’habitude de définir une roche par sa composition en cristaux – ou en minéraux pour parler plus correctement. Pour comparer les basaltes aux autres roches, ils calculent une composition minéralogique théorique. La plus utilisée est la norme CIPW, mise au point en 1915 par Cross, Iddings, Pirsson et Washington. En partant d’un basalte tholéiitique avec 50 % de silice, par exemple, les calculs fournissent une « roche théorique » comprenant par ordre d’importance de l’anorthite CaAl2Si2O8 (plagioclase calcique), de l’albite NaAlSi3O8 (plagioclase sodique), de l’hypersthène (Mg,Fe)2(SiO3)2 (orthopyroxène), du diopside CaMg(SiO3)2 (clinopyroxène), du quartz et d’autres minéraux. Il n’y a pas d’olivine. Les basaltes alcalins comprennent moins de silice, environ 47,7 %. La « roche théorique » comprend cette fois de l’olivine. Mais c’est aussi le cas des roches réelles. Celles-ci ont à la fois des phénocristaux et des microcristaux d’olivine. Les seuls pyroxènes présents sont des clinopyroxènes.
À partir de la composition minérale normative, c’est-à-dire théorique, Yoder et Tilley ont établi une classification des basaltes. Ils sont répartis entre quatre pôles : clinopyroxène, quartz, olivine et néphéline. Ce dernier minéral est un feldspathoïde de formule Na3K(SiAlO4)4. Il contient du potassium, pas encore cité jusqu’à présent. Il peut être réellement présent dans les basaltes alcalins, lesquels sont les plus pauvres en silice ne comportent jamais de quartz. La photo montre un basalte alcalin récent, avec de nombreuses olivines. Les cavités ont été faites par des gaz dans la lave, avant sa solidification.
Les basaltes tholéiithiques ou tholéiites sont plus riches en silice mais plus pauvres en alcalins. Le quartz peut être présent à l ’état de microcristaux et plus rarement de cristaux visibles à l’œil nu. Les olivines y sont par contre exceptionnelles.
La seconde photo montre un basalte au microscope polarisant. Elle a été coupée en une lame mince de 30 micromètres d’épaisseur. La lumière passe par un premier polariseur, traverse la lame puis un deuxième polariseur perpendiculaire au premier. De la sorte, tous les verres sont en noir. Les phénocristaux de plagioclase sont reconnaissables à leurs formes en baguettes et à leurs couleurs blanche à grise. Ils sont maclés : deux cristaux de couleurs différentes sont associés. Deux phénocristaux d’olivine sont présents à gauche, entre deux plagioclases, et en bas à gauche. Ils ont été altérés en un ensemble d’hydroxydes de fer appelé iddingsite. Les clinopyroxènes se reconnaissent à leur vives teintes de polarisation : ils sont oranges à violets. Ce basalte me semble donc être alcalin.
Ce type de basalte apparaît dans les appareils volcaniques intracontinentaux. Le volcanisme de la Chaîne des Puys en fournit un exemple. L’analyse de la photo permet de retracer l’histoire de ce basalte. Les phénocristaux de plagioclase ont des faces planes car ils ont pu croître librement dans le magma. On dit qu’ils ont automorphes. Ces cristaux se sont formés quand le magma était au repos dans une chambre magmatique. La part des microcristaux est importante. La lave n’a pas été trop brutalement refroidie, si bien qu’ils ont eu le temps de croître et qu’il y a peu de verre. De plus, ces cristaux ne sont pas orientés. Cela signifie qu’ils ne se sont pas formés lors d’un écoulement de la lave. Elle était au repos.
Solidification des basaltes
À quelle température la lave se solidifie-t-elle ? La réponse à cette question est complexe parce que plusieurs minéraux apparaissent et que leurs températures de solidification sont différentes. Prenons comme exemple un magma basaltique composé de trois minéraux entièrement fondus : anorthite, diopside et forstérite (plagioclase, pyroxène et olivine). Ces minéraux sont immiscibles, c’est-à-dire qu’ils ne peuvent pas former de solution solide comme la forstérite et la fayalite. Lors de la cristallisation du magma, ils deviendront obligatoirement des minéraux distincts. À pression ambiante, la forstérite cristallise à 1890 °C. C’est un minéral très réfractaire. L’anorthite et le diopside cristallisent à des températures plus basses, respectivement à 1553 °C et à 1372 °C.
On pourrait penser que lors du refroidissement du magma, les cristaux de forstérite seront les premiers à apparaître, mais en fait, ça dépend de la composition du liquide, c’est-à-dire des proportions d’anorthite, de diopside et de forstérite. Pour cela, on dessine un triangle dont chaque point représente une composition. Les trois sommets correspondent aux trois « pôles » : les cas où un seul minéral est présent. Le point M représente la composition pour laquelle la température de solidification est la plus basse. Ce mélange est dit eutectique et M est qualifié de « puits eutectique ». Il faut de l’anorthite et du diopside à parts égales et environ 10 % de forstérite. Quand on refroidit le liquide, il ne se passe rien jusqu’à 1270 °C, puis les trois minéraux se mettent à cristalliser en même temps.
Prenons un autre mélange, comportant un taux élevé de forstérite. Lors du refroidissement, seuls des cristaux de forstérite apparaissent, comme il est indiqué sur la figure. Mais à cause de cette cristallisation, le liquide s’appauvrit en forstérite et le point qui représente sa composition se déplace à l’intérieur du triangle. Il gagne l’une des lignes oranges, appelées vallées eutectiques ou lignes cotectiques, et simultanément, la température diminue. Si la ligne située à droite de M est atteinte, par exemple, de l’anorthosite se met à cristalliser en même temps que la forstérite. Le point représentant la composition du liquide se déplace le long de la ligne cotectique jusqu’en M. Le diopside se met alors à cristalliser. La température reste à 1270 °C jusqu’à la disparition du liquide, après quoi elle se remet à décroître. Maintenant, si l’on prend un liquide proche du pôle anorthite, c’est ce minéral qui va cristalliser le premier.
Un tel mélange qui serait entièrement cristallisé s’appelle un gabbro. Il est constitué de cristaux visibles à l’œil nu.
La cristallisation d’un mélange eutectique donne une structure très particulière à la roche, puisque les trois minéraux ont cristallisé en même temps. Les cristaux ont souvent un aspect lamellaire. En revanche, dans le cas où la forstérite a cristallisé en premier, les cristaux formés sont automorphes.
Comment se passe la fusion d’un basalte ? Le premier liquide qui apparaît a la composition de l’eutectique, dans une large gamme de compositions du solide initial. Ainsi, même si l’on fait varier les teneurs en diopside, forstérite et anorthite, le premier liquide obtenu reste identique et la fusion commence à 1270 °C. Cette température est proche de la température maximale des laves basaltiques observées dans la nature, qui est de 1200 °C. Même si l’on supprime l’anorthite, ce liquide reste un basalte. Cette roche, constituée seulement d’olivine (la forstérite) et de pyroxène (la diopside), est une péridotite.
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