Histoire de la Terre et de la vie - Actualités géologiques

Débunkage

Propos de climatosceptiques sur le cycle du carbone

Carotte WAIS Divide

Carotte de glace WAIS Divide.

Le doute est permis en sciences. Il existe de multiples façons de douter que l’humanité soit à l’origine du réchauffement climatique actuel. Certaines personnes remettent en cause son existence même, mais elles ne sont pas animées par une démarche scientifique. Elles ne devraient pas être qualifiées de « sceptiques ». Le terme de « climatosceptique » sera cependant conservé ici par commodité. Ces gens sont en réalité des militants qu’aucun argument ne fera jamais changer d’avis. Dans cet article, trois d’entre eux sont présentés. On verra que les deux premiers sont restés fidèles à leur cause jusqu’à leur mort et que l’on peut douter de la sincérité du troisième. Ce sont des scientifiques mais aucun d’eux n’a une formation de climatologue ou de météorologue. Ils sont parfois contredits par des climatosceptiques moins radicaux et mieux informés.

Cet article ne parle pas de climat. Il est exclusivement consacré au cycle du carbone, c’est-à-dire aux échanges de carbone entre l’atmosphère, les océans et les continents. La lecture de l’article sur la la mesure de la concentration du dioxyde de carbone atmosphérique est conseillée et, si possible, celui sur les émissions anthropiques de dioxyde de carbone, qui est d’un niveau un peu plus élevé.

Zbigniew Jaworowski (1927-2011)

Plus d’une décennie après sa mort, les climatosceptiques considèrent ce physicien polonais comme un glaciologue de renommée internationale, alors qu’il n’a rien découvert dans ce domaine et que ses seules publications sont des tentatives de réfutation de travaux qui sont aujourd’hui unanimement admis. Son objectif était de démontrer que l’humanité n’a pas fait augmenter la concentration du CO2 atmosphérique malgré son utilisation massive des combustibles fossiles. Les bulles d’air contenues dans les glaces de l’Antarctique montrent qu’elle était d’environ 280 ppmv avant l’ère industrielle et qu’elle a dépassé les 310 ppmv en 1958, date à partir de laquelle la teneur en CO2 a pu être mesurée dans l’air de manière fiable. Il est important de dire que sur 30 ans, de 1958 à 1978, ces mesures confirment ce que disent les carottes de glace. Vraiment, plus aucun scientifique aujourd’hui ne nie la hausse de la teneur en CO2. Des « sceptiques » comme Hermann Harde (présenté ci-dessous) affirment seulement qu’elle n’est que partiellement d’origine humaine. Il n’y a ainsi plus aucune raison de citer Jaworowski.

Né en 1927 à Cracovie, il a commencé par faire des études de médecine. De 1953 à 1958, il a travaillé dans la radiothérapie, à l’Institut d’oncologie de Gliwice. Après avoir obtenu son doctorat en 1967, il est devenu professeur en science médicale. De 1970 à 1987, il officiait au Laboratoire central pour la protection radiologique de Varsovie. Quand il a commencé à étudier les glaciers, c’était pour y trouver des traces de métaux lourds et de radionucléides. Il a travaillé de 1988 à 1990 à l’Institut norvégien de recherche polaire. La communauté scientifique avait alors pleinement pris conscience du réchauffement climatique. Le GIEC avait été créé en 1988 et son premier rapport publié en 1990. Jaworowski l’a immédiatement contesté. Il n’admettait pas qu’on prenne des mesures pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Tombe de Jaworowski
La tombe de Jaworowski à Varsovie.

Avec le géologue norvégien Tom Segalstad et un chercheur japonais, il a publié en 1992 dans la revue Science of the Total Environment un article intitulé « Do glaciers tell a true atmospheric CO2 story ? », où il dénombre plus de 20 processus physico-chimiques susceptibles d’altérer la composition chimique des bulles d’air des glaces. Cependant, il n’a jamais tenté de quantifier leurs effets, pour dire quelles corrections il convient d’apporter aux mesures. Sa seule conclusion est que les informations données par les carottes de glace ne sont pas fiables.

Un deuxième article a été publié en 1994 dans la revue Environment Science and Pollution Research : « Ancient Atmosphere : Validity of Ice Records ». Il y a seulement résumé ce qu’il avait écrit deux ans plus tôt, sans rien apporter de nouveau. Bien que cette revue soit très difficile à trouver, le chercheur suisse Hans Oeschger (1927-1998) a repéré cet article et y a répondu l’année suivante. Contrairement à Jaworowski, c’est un éminent glaciologue. Il est le fondateur de la Division du climat et de la physique environnementale à l’université de Berne, qu’il a dirigée de 1963 à 1992. On lui doit notamment la découverte, grâce aux glaces du Groenland, de changements climatiques brutaux durant la dernière période glaciaire. Ces évènements portent son nom et celui de son collègue danois Willi Dansgaard (1922-2011). Les climatosceptiques n’hésitent pas à les mentionner, pour montrer que des changements climatiques peuvent se produire sans influence humaine.

Lyndon LaRouche
Couverture de la revue 21st Century Science & Technology de Lyndon LaRouche. Elle annonce un âge de glace.

Oeschger rappelle que l’augmentation de la teneur en CO2 atmosphérique a été confirmée, de manière indépendante, par les mesures de carbone 13 dans les coquilles des foraminifères – des protistes très utilisés en paléoclimatologie. Il explique que pendant des années, Jaworowski « n’a mis l’accent que sur les difficultés de ces études, a formulé les hypothèses sous-jacentes qui ne sont parfois que partiellement remplies et a critiqué sans scrupule le travail effectué jusqu’ici. Il le fait sans aucune appréciation pour le développement des compétences dans ce domaine depuis plusieurs décennies. Ainsi, il extrapole des problèmes de contamination dans des expériences pionnières improvisées à la fin des années soixante à des expériences similaires plus récentes sur la calotte glaciaire du Groenland pour lesquelles un équipement spécial a été développé. » La contamination dont il parle, c’est l’irruption d’air récent dans les carottes de glace, un problème dont les scientifiques sont parfaitement conscients.

Hans Oeschger
Photo officielle de Hans Oeschger au Tyler Price for Environmental Achievement.

Oeschger mentionne ensuite deux erreurs effectuées par Jaworowski. Avec la pression, les molécules de CO2 s’incorporent dans la glace, formant des clathrates. Cela complique l’analyse des bulles d’air. Mais Jaworowski prétend que cela se fait à partir de 70 mètres de profondeur, ce qui est complètement faux. Ils apparaissent en réalité à plusieurs centaines de mètres de profondeur. Ensuite, Jaworowski affirme que l’âge de la glace et celui des bulles d’air qu’elle contient sont les mêmes, ce qui lui permet de dire, en se basant sur le carottage du dôme Siple en Antarctique, qu’un accroissement drastique de CO2 et de méthane s’est produit au milieu du XIXe siècle. Mais c’est encore faux. Il est bien connu que les bulles d’air sont toujours plus récentes que la glace, et donc que cette hausse date en fait du XXe siècle.

Jaworowksi n’a jamais rendu les armes. Il a publié plusieurs autres articles, dont « Ice core data show no carbone dioxyde increase » en 1997, « Solar Cycles, not CO2, determine Climate » en 2004, « The global warming folly » en 1999, « CO2 : The greater scientific scandal of our time » en 2007. Le problème est que ces quatre articles n’ont pas été publiés dans des revues scientifiques. Elles l’ont été dans la revue 21st Century Science & Technology, du politicien américain Lyndon LaRouche (1922-2019) , qui était climatosceptique par principe. Finalement, la mort a fait taire Jaworowski en 2011.

Ernst-Georg Beck (1948-2010)

Un professeur de biologie allemand, Ernst-Georg Beck (1948-2010), a publié en 2007 un article dans lequel il rappelle que des mesures de concentration ont été effectuées dès 1812, par des méthodes chimiques. L’une d’elles a été mise au point en 1857 par le chimiste et hygiéniste allemand Max Joseph von Pettenkofer. Il est intéressant de connaître ces procédés mais les résultats laissent songeur. Des augmentations spectaculaires de concentration se seraient produites vers 1810-1820, jusqu’à 540 ppm, puis vers 1940, jusqu’à 420 ppmv, suivies de baisses aussi soudaines. Ce que Beck cherchait à dire, c’est que l’augmentation actuelle n’a rien d’exceptionnel et que des fluctuations importantes se produisent de manière naturelle.

Il n’est pas étonnant que Beck ait pu publier son article dans la revue Energy & Environment, car son éditrice Sonja Boehmer-Christiansen est une climatosceptique revendiquée. C’est également elle qui a donné la parole à Stephen McIntyre et Ross McKitrick, pour contredire Michael Mann au sujet du réchauffement climatique actuel ou à l’astrophysicien Willie Soon. En outre, cette revue est définie comme un forum où des personnes de tous horizons, pas forcément scientifiques, peuvent s’exprimer.

Après sa publication de 2007, Beck a poursuivi son travail. Il a écrit le jour de Noël 2008 à Harald Yndestad, un chercheur norvégien, puis il lui a rendu visite en août 2009. Deux mois plus tard, un nouvel article était prêt, mais un cancer commençait à l’affaiblir. Il est mort le 21 septembre 2010 et son article a été sèchement refusé le 15 novembre par le Journal of Climate de l’American Meteorological Society : les carottages de l’Antarctique démontraient qu’il se trompait. L’affaire n’était cependant pas terminée. La petite revue norvégienne Science of Climate Change a publié son article en 2022, douze ans après sa mort. Son comité éditorial comprend des climatosceptique notoires, dont Hermann Harde et Ole Humlum. Il a cependant permis à Ferdinand Engelbeen d’expliquer pourquoi Beck avait faux. Auparavant, Ralph Keeling (le fils de Charles Keeling, qui poursuit son œuvre au Mauna Loa) et Harro Meijer de l’université de Groningen aux Pays-Bas avaient envoyé deux commentaires à la revue Energy & Environment . Celui d’Engelbeen est plus détaillé.

Mesures chimiques de CO2
Compilation de mesures chimiques de concentration du CO2 effectuées entre 1800 et 1955, présentée par Stig Fonselius et al., 1956. Les valeurs retenues par l’ingénieur Guy S. Callendar (1898-1964) sont entourées, ainsi que celles obtenues en 1955 par l’équipe de Fonselius.

Il est exact que, comme le dit Beck, de très nombreuses mesures de la teneur en CO2 atmosphérique ont été effectuées avant 1958, par des procédés chimiques. La compilation ci-dessus a été présentée par l’équipe de Stig Fonselius en 1956. La dispersion des valeurs avant 1860 est gigantesque, mais cela n’a pas empêché Beck de donner des valeurs précises de la teneur en CO2 de cette époque :

courbe de Beck
Concentration du CO2 atmosphérique entre 1812 et 1961 d’après Beck, 2007. La courbe lissée sur 11 ans présente deux maximums vers 1822 et 1942. Les températures moyennes globales d’après le GIEC (IPCC Temperature) sont également indiquées, ainsi que le nombre de taches solaires (sunspot cycle).

Dans son article de 2022, Beck a reconnu que les mesures effectuées avant 1860 étaient beaucoup trop imprécises. Il a placé de grandes barres d’erreur dans son graphique. Cependant, la hausse de la concentration de 1940 est conservée :

courbe de Beck 2022

Ferdinand Engelbeen est un ingénieur chimiste belge qui penche vers le climatoscepticisme. Il s’est consacré au cycle du carbone à sa retraite et s’est affilié à l’organisation américaine CO2 Coalition. Il a eu de longues discussions avec Beck durant les années 2000, sur lesquelles il s’est basé pour écrire son commentaire. Il considère que les méthodes chimiques de mesure de la concentration du CO2 sont bonnes mais que les lieux où elles ont été effectuées ne conviennent pas. Comme l’expliquent aussi Keeling et Meijer, le problème est de mesurer un « arrière-plan » de CO2, loin des sources et des puits. Les zones urbaines et même les forêts sont ainsi de mauvais endroits pour faire des mesures, à cause des concentrations locales, c’est pourquoi des observatoires ont été installés dans le Pacifique ou au pôle Sud. Beck n’avait pas suffisamment compris la difficulté de mesurer la teneur en CO2 sur les continents. En plus, il a fait plusieurs erreurs dans l’interprétation des données disponibles.

La concentration globale du CO2 ne peut pas augmenter ou diminuer par magie. Ainsi que l’explique Stefan Rahmstorf, il faudrait brûler beaucoup plus de combustibles que l’humanité ne le fait maintenant pour provoquer de telles hausses. Une augmentation de la concentration de 310 à 420 ppm, comme supposée entre 1920 et 1945, demande le rejet de 233 gigatonnes de carbone dans l’atmosphère. Et surtout, il n’existe aucun moyen de résorber tout ce CO2 en quelques années.

Hermann Harde

Puisqu’il n’est maintenant plus question de nier l’augmentation de la concentration en CO2 révélée par les carottes de glace, les climatosceptiques ont choisi un autre angle d’attaque.

En 2017, le physicien allemand Hermann Harde, qui a été doyen puis vice-président de l’université Helmut-Schmidt de Hambourg, a publié un article dans la revue Global and Planetary Change, où il affirme que seulement 4,3 % du CO2 atmosphérique est d’origine humaine et que l’activité humaine n’est responsable que de 15 % de la hausse de la concentration du CO2 depuis le XIXe siècle. Des scientifiques ont relevé de grossières erreurs et ont conclu qu’un tel article n’aurait jamais dû être accepté. La revue a publié en 2018 une réponse de Peter Köhler, Judith Hauck et six autres auteurs qui expliquent pourquoi son raisonnement est erroné, et elle a présenté des excuses à ses lecteurs. Harde avait demandé que son article soit examiné par cinq scientifiques qu’il avait lui-même choisis. Ils ont donné leur accord pour la publication de l’article, mais après examen de leur CV, on s’est aperçu qu’aucun d’eux n’était un spécialiste du cycle du carbone ou d’autres champs de recherches similaires. Tous soutiennent que la hausse de la concentration du CO2 est en grande partie naturelle.

Hermann Harde
Hermann Harde lors d’une conférence au think tank climatosceptique allemand EIKE.

Ce résultat de 4,3 % résulte d’une erreur extrêmement grossière commise dès le début de son article. Harde se base sur les estimations fournies en 2014 par le cinquième rapport d’évaluation du GIEC des flux de carbone entre l’atmosphère, les océans et les continents. D’après ce rapport, les océans émettent 78,4 GtC/an (gigatonnes de carbone par an), la végétation émet 118,7 GtC/an, les eaux douces émettent 1 GtC/an et les volcans émettent 0,1 GtC/an. Ces flux ne sont pas entièrement naturels, car l’activité humaine les a fait varier. De plus, elle est responsable de l’émission de 7,8 GtC/an par l’utilisation des combustibles fossiles et de 1,1 GtC/an par les changements d’utilisation des sols (dont la déforestation). Cela fait un total de 207,1 gigatonnes de carbone par an, ou encore de 760 gigatonnes de CO2 par an (il faut multiplier le premier nombre par 3,67 pour obtenir le second), appelés ET par Harde. Les émissions anthropiques EA sont de 8,9 GtC/an ou encore de 32,6 gigatonnes de CO2 par an. Si ce raisonnement est exact, le rapport EA/ ET entre les émissions anthropiques et totales vaut bien 0,043 comme le dit Harde.

Cycle du carbone d'après le GIEC.
Le cycle du CO2 selon le cinquième rapport d’évaluation (AR5) du GIEC, publié en 2014. Les masses sont exprimées en pétagrammes (=gigatonnes) de carbone et les flux en pétagrammes de carbone par an. Les contributions humaines sont indiquées en rouge.

L’erreur vient du fait que les océans et la végétation absorbent du CO2. Il faut donc prendre leurs échanges nets avec l’atmosphère, et non pas seulement leurs émissions, comme le montre d’ailleurs très clairement le schéma du GIEC (net ocean flux et net land flux). Les océans et la végétation absorbent respectivement 1,6 GtC/an et 4,3 GtC/an (en oubliant des incertitudes), soit un total de 5,9 GtC/an. Les émissions totales ET de CO2 deviennent par conséquent : ET = (– 5,9 + 1 + 0,1 + 8,9) × 3,67 = 15 gigatonnes de CO2 par an. Puisque les émissions anthropiques EA = 32,6 GtCO2/an leur sont supérieures, on ne peut pas les exprimer comme un pourcentage de ET.

Il suffit de savoir calculer pour voir cette erreur, mais apparemment les éditeurs de Global and Planetary Change n’ont pas lu l’article. Quant à Harde, on peut supposer que ce physicien de formation sait lire un schéma et effectuer quelques opérations. Il a donc fait une erreur volontaire, afin de tromper les lecteurs insuffisamment attentifs, avec la complicité de ses cinq examinateurs. Harde n’a jamais reconnu son erreur. Il persiste et signe dans un autre article qu’il a fait publier dans Earth Sciences en 2019 (une revue prédatrice qui publie tous les auteurs acceptant de payer 970 dollars). Cette tromperie a été reprise avec enthousiasme par presque tous les climatosceptiques, dont l’Association des climato-réalistes en France. Son président, Benoît Rittaud, est un pourtant un mathématicien ! Emmanuel Vilmin a traduit l’article de 2019 en français et Camille Veyres, ingénieur polytechnicien et spécialiste du rayonnement électromagnétique et de la fibre optique chez Orange, a révisé cette traduction et l’a enrichie de 23 commentaires. La conclusion est sans appel :

« En moyenne, sur la période 2007-2016, les émissions anthropiques (FFE et LUC ensemble [fossil fuel emissions & land use change]) n’ont contribué que 4,3 % à la concentration totale de 393 ppm et leur contribution à l’augmentation atmosphérique de 113 ppm depuis 1750 ne dépasse pas 17 ppm, soit 15 %. Avec d’autres évaluations de l’absorption, la contribution des émissions anthropiques est plus faible encore. Ainsi, en vérité ce ne sont pas les émissions anthropiques, mais principalement les processus naturels, en particulier la température, qui doivent être considérés comme les principales causes de l’augmentation du CO2 observée au cours des 270 dernières années comme aussi sur les périodes paléoclimatiques. »

Quand on répète inlassablement le même mensonge, il en reste toujours quelque chose. Ce chiffre de 4,3 % (ou même un chiffre inférieur) est devenu un dogme chez les climatosceptiques les plus convaincus. Le message de Harde a été retenu : ce n’est pas la peine de baisser les émissions humaines de CO2, puisqu’elles ne sont quasiment pour rien dans la hausse de la concentration observée depuis le XIXe siècle.

Cycle du carbone d'après Hermann Harde
Le cycle du carbone vu par Hermann Harde. Il sait que les océans et la végétation émettent et absorbent du CO2, mais il ne tient pas compte de l’absorption.

Harde ne s’embarrasse plus maintenant de publications dans des revues scientifiques à comité de lecture. Il a sa propre revue : Science of Climate Change. En 2023, le comité éditorial a permis à des opinions contradictoires de s’exprimer, celles du physicien David E. Andrews et de Ferdinand Engelbeen. Ils expliquent en quoi son raisonnement est faux, mais c’est Harde qui a eu le dernier mot. Le débat est accessible sur cette page.

Murry Salby (mort en 2022)

Il est difficile de parler de Hermann Harde sans mentionner Murry Salby, car il lui a donné une caution scientifique. Contrairement à Harde, Salby est un spécialiste de la physique de l’atmosphère. Il a présenté sa thèse de doctorat en 1973 au Georgia Institute of Technology, dans le domaine de la dynamique environnementale. Il est devenu professeur à l’université du Colorado en 1984. On lui doit deux excellents manuels de physique de l’atmosphère, publiés en 1996 et 2012, ainsi que « des centaines d’articles dans des revues internationales réputées » d’après Harde (en fait, plutôt quatre-vingt-huit, d’après ResearchGate). Mais l’œuvre scientifique d’un homme ne dit rien de son intégrité morale. Un scandale de surfacturation de subventions et conflits d’intérêts l’a contraint à quitter l’université du Colorado en 2007 et à rejoindre l’université Macquarie de Sydney en Australie. Il en a été renvoyé en 2013 à cause de son inconduite.

Salby ayant une position climatosceptique, Harde l’a convié à Hambourg pour y donner une conférence le 10 octobre 2018. Elle est disponible en intégralité. Il approuve l’article que Harde a publié en 2017, sans lui reprocher sa grossière erreur. Il défend l’idée que les émissions anthropiques de CO2 représentent moins 5 % des émissions totales, mais d’une manière beaucoup plus subtile que Harde. Il a aidé celui-ci à rédiger son article de 2019, où Harde cite sa conférence et le remercie pour les « nombreuses discussions stimulantes » qu’ils ont eues. Plus tard, jusqu’en 2022, les deux hommes ont cosigné des articles publiés dans Science of Climate Change, mais ils n’ont aucune valeur scientifique puisque ce n’est qu’une petite revue climatosceptique. Une conférence faite devant un parterre de climatosceptiques, où Salby leur dit ce qu’ils ont envie d’entendre (parce qu’il est payé pour ça), n’a pas non plus de valeur.

Pour Murry Salby, les émissions anthropiques de CO2 (courbe magenta) ne représentent qu’une petite fraction des émissions totales (observations en vert).

On note la présence de Fritz Vahrenholt, coauteur avec Sebastien Lüning, en 2014, du livre « Le Soleil froid, Pourquoi la catastrophe climatique ne se produit pas », qui attribue le réchauffement climatique au Soleil. Ce sont deux lobbyistes des industries de l’énergie. Vahrenholt a été sénateur SPD de Hambourg, il a siégé au conseil d’administration de Deutsche Shell AG, est devenu PDG de la société d’éoliennes REpower Systems AG, puis PDG d’une filiale de la société d’électricité RWE. On se demande combien Salby a été payé pour cette conférence, mais les organisateurs ont bien sûr été d’une grande discrétion à ce sujet.

Michael Limburg, vice-président du think tank climatosceptique Europäisches Institut für Klima und Energie (EIKE), était également présent. Il a organisé une conférence internationale en novembre 2018, où des personnages cités plus haut se sont exprimés : Hermann Harde, Camille Veyres et Harald Yndestad. Voir la présentation de EIKE dans DeSmog.

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Le site RealClimate, où les articles sont rédigés par de véritables climatologues, a consacré deux articles à Hermann Harde : Something Harde to believe… (25 février 2017) et Harde Times (4 avril 2018).

Ferdinand Engelbeen a publié une critique des articles de Jaworowski sur son blog personnel. D’après lui, Jaworowski et Beck discréditent la cause climatosceptique, par leurs affirmations erronées.

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