Le Cénozoïque est une ère qui s’étend de la grande extinction de la fin du Crétacé jusqu’à maintenant. On peut la considérer comme l’ère des mammifères, les seuls dinosaures ayant survécu à la crise étant les oiseaux. Elle était autrefois divisée en Tertiaire et en Quaternaire. La première dénomination n’est plus utilisée. On parle plutôt du Paléogène et du Néogène, qui regroupent cinq séries, où les chiffres indiquent des millions d’années :
66 – Paléocène – 56 – Éocène – 33,8 – Oligocène – 23 – Miocène – 5,3 – Pliocène – 2,58
Le Paléogène comprend les trois premières séries et le Néogène les deux suivantes. La limite entre le Paléocène et l’Éocène est déterminée par un événement climatique. Il y a 56 Ma, la température moyenne de l’atmosphère, qui était déjà élevée, a brusquement augmenté. Elle a gagné 5 à 8 °C, entraînant une forte dilatation thermique des océans, donc une hausse du niveau des mers. Cela est dû à une importante libération de gaz à effet de serre, le dioxyde de carbone et le méthane, dont la raison reste à déterminer. Cet épisode a duré dans les 200 000 ans. Il est appelé le Maximum thermique tardi-paléocène ou PETM (Paleocene-Eocene Thermal Maximum) en anglais.
En 2012, une équipe de scientifiques a fait sensation en annonçant que des forêts existaient toujours en Antarctique, au début de l’Éocène, et qu’il poussait même des palmiers ! Il y avait aussi des Bombacacées, une famille d’arbres tropicaux dont font partie les baobabs. Les hivers étaient très doux, avec des températures dépassant les 10 °C, et dépourvus de gel malgré les nuits polaires. La zone étudiée était la Terre de Wilkes, qui est tournée vers l’Océan Indien et dont les côtes coïncident avec le Cercle polaire antarctique. Ceci est à mettre en relation avec le taux de dioxyde de carbone à l’époque, qui avait au moins 1 000 ppmv (0,1 %) de plus que maintenant. Ce taux était de 280 ppmv avant l’ère industrielle, de 400 ppmv maintenant. Actuellement, la Terre de Wilkes porte 1 800 à 2 900 mètres de glace. Toute la question est donc de savoir comment et pourquoi l’Antarctique a connu un tel refroidissement, en une période de 26 millions d’années. En fait, c’est toute la Terre qui s’est refroidie.
Ce graphique donne l’évolution du « Benthic δ18O » au cours du Cénozoïque. Pour simplifier, on peut dire que cela a un rapport avec la température mesurée au fond des océans, près des pôles dans ce cas précis, jusqu’il y a 35 Ma, et avec la mise en place de la calotte glaciaire de l’Antarctique de l’Oligocène jusqu’à maintenant. Bref, on voit le pic de température du PETM. Après cela, les températures sont remontées à peu près au même niveau mais de manière plus lente. Le maximum a été atteint il y a 50 Ma, après quoi elles ont commencé à chuter. C’est grâce à cet Optimum Climatique qu’il y avait des arbres tropicaux en Antarctique. Les mers avaient un niveau élevé, à cause de la dilatation thermique des eaux et de l’absence de calotte glaciaire – les auteurs de ce planisphère n’auraient pas dû mettre de glace au pôle Sud. Un fait remarquable est que l’Europe était séparée de l’Asie par la mer, à l’est de l’Oural. C’était déjà le cas il y a 66 millions d’années, à la fin du Crétacé. Un autre fait est que les courants marins pouvaient passer entre l’Europe et l’Afrique, puis entre l’Amérique du Nord et l’Amérique du Sud, qui n’étaient pas encore reliés. Ils suivaient les alizés.
Il y a 66 Ma, le petit continent indien était encore sous l’équateur. Il y a 50 Ma, il entre en collision avec la plaque eurasienne, entraînant la surrection d’une première chaîne himalayenne. Une deuxième chaîne plus élevée s’élève à partir du Miocène, constituant la dalle cristalline du Haut Himalaya ou « dalle du Tibet ». Or ces montagnes, situées à de basses latitudes, donc recevant beaucoup de pluies, sont soumises à une intense érosion, qui est une pompe à CO₂. L’érosion de l’Himalaya continue jusqu’à aujourd’hui et contrebalance son élévation. Chaque année, 2 milliards de tonnes de sédiments sont déversés dans le delta du Bengale ! Cela a pu contribuer à la baisse des températures. Mais en fait, elles n’ont pas baissé à l’équateur. Il y a 50 Ma, le gradient thermique était très faible de l’équateur aux pôles. Ce gradient a augmenté avec le refroidissement.
La fin de l’Éocène, il y a 34 Ma, est marquée par une chute brutale des températures, de près de 4 °C, avec l’apparition d’une calotte glaciaire permanente sur l’Antarctique. Des petites calottes transitoires avaient déjà fait leur apparition il y a 37 Ma. Cela provoque la plus grande extinction d’espèces depuis la fin du Crétacé, la « Grande Coupure », dont de nombreux invertébrés marins sont victimes. Tous les grands mammifères qui étaient apparus disparaissent, dont l’Uintatherium et l’Embolotherium, des herbivores de la taille du rhinocéros, et un ordre de mammifères carnivores, les Mésonychidés, dont les derniers représentants avaient quatre doigts à chaque patte, terminés par des sabots. Son représentant Andrewsarchus avait un crâne de 90 cm de long, ce qui fait de lui le plus grand de tous les mammifères carnivores. Il vivait en Asie. On a supposé qu’une ou deux météorites étaient responsables de cette extinction, mais ce changement climatique brutal fournit une explication suffisante. Au début de l’Oligocène, il s’est produit une baisse spectaculaire du niveau des mers, de 200 mètres. Alors qu’il était supérieur au niveau actuel depuis le Crétacé, il devient inférieur. C’est dû au refroidissement du climat et à l’accumulation des glaces sur l’Antarctique.
Cette glaciation dure huit millions d’années avant qu’un rapide réchauffement ne se produise, durant l’Oligocène. La calotte glaciaire de l’Antarctique ne disparaît pas complètement mais rétrécit et redevient transitoire. C’est le dégel (Antarctic thawing) du graphique. On sait qu’une végétation substantielle est apparue en bordure du continent. Un optimum climatique se produit il y a environ 16 Ma, au milieu du Miocène. L’englacement de l’Antarctique redevient permanent il y a 12 Ma (Antarctic reglaciation). Parmi les causes envisagées, figurent la baisse du taux de CO₂ et l’ouverture du passage de Drake entre la Terre de Feu et la péninsule Antarctique, qui s’approfondit vers 35 Ma. Le courant circumpolaire antarctique, qui fait le tour de ce continent d’ouest en est, empêche les eaux chaudes de l’atteindre. La chute du taux de CO₂ a pu être provoquée par de vastes forêts marécageuses. Elles ont été enfouies et fonctionnaient donc comme des puits de carbone. Toutefois, elles n’ont pas eu le temps de se transformer en houille ou en anthracite : elles ont donné du lignite.
Durant l’Oligocène, les forêts tropicales ont régressé et des arbres à feuilles caduques se sont répandus dans les zones tempérées. La savane a gagné du terrain, avec l’expansion des graminées, en particulier de l’herbe. Les mammifères ont recommencé à augmenter en taille. Les courants équatoriaux dont j’ai parlé ont été interrompus, à cause du rapprochement de l’Afrique et de l’Eurasie et de la fermeture de l’océan Téthys. La plaque arabique, qui faisait encore partie de la plaque africaine, est entrée en collision avec la plaque eurasienne, entraînant la surrection des monts Zagros. De plus, le passage entre les deux Amériques a été rendu plus difficile, contraignant les courants à longer les méridiens dans l’Atlantique. Le volcanisme du Pliocène a entraîné la fermeture totale de l’isthme de Panama, permettant il y a 2,5 Ma aux faunes des deux Amériques de se mélanger. C’est de cette période que date le Gulf Stream, un courant qui prend sa source dans les Caraïbes pour longer l’Europe et atteindre le Groenland. En apportant de l’humidité à ce dernier, il a contribué à la formation de sa calotte glaciaire. Les premières glaces sont apparues il y a 8 Ma, en même temps que l’intensification des moussons asiatiques. La calotte est devenue permanence il y a 3 Ma.
Cet autre graphique de Robert A. Rhode montre le cycle des glaciations depuis 5 Ma. La périodicité de 41 000 ans puis de 100 000 ans a été indiquée. Ce cycle a une origine astronomique. Toutefois, la tendance à la baisse des températures reste visible. Depuis le Carbonifère, le taux de CO₂ dans l’atmosphère n’a jamais été aussi bas. Depuis 150 ans, il remontre brutalement grâce à la combustion des énergies fossiles et à la déforestation.
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